Anges et démons

Nu, assis, je baisse la tête et sous mes yeux apparaissent de curieux personnages. Je traque et collectionne leurs apparitions et je m’interroge.

Des explorations sur le genre face à la psyché à l'observation de tous ces personnages qui trépignent d'impatience, le cadre de l'interrogation s'est considérablement réduit. Est-ce ainsi que les hommes… se définissent ? Se singularisent ? « Le pénis est une construction sociale » déclarait un article très sérieux publié en 2017 par une revue scientifique. Il s’agissait en fait d’un canular de Skeptic exploitant habilement l'« extrémisme idéologique » des études de genre. Un pénis n’a t-il pas droit à une existence en dehors de sa fonction ? L’y réduire le prive de la majeure partie de sa vie. La répartition de ses représentations en conquérant ou au repos ne respectent pas les proportions de temps passé dans ces deux états. Peut-on le regarder simplement, comme il est, l’observer en dehors de ce qu’il fait ? Entre silence pudique et brouhaha médiatique, le montrer reste délicat. Recueillir son expression aussi. Les hommes sont encore peu enclins à exprimer leur ressenti.

Ceci n’est pas une bite.
On ne peut être que d’accord avec Magritte pour dire que la représentation ne doit pas être prise pour ce qu’elle représente et poser plus largement la dimension culturelle des multiples façons de voir et percevoir à la fois l’objet et ses représentations. André Breton, en 1936, appelait à la création d’objets oniriques, à la réappropriation d’objets détournés de leurs fins originelles ou altérés par quelque force extérieure. Les surréalistes voulaient ainsi mettre en déroute les habitudes rationnelles du spectateur et l’inciter à repenser son rapport à la réalité. La mission est toujours d’actualité.

2017

Le nu absolu
Ce qui est fascinant pour les femmes, à mon sens, c'est que l'homme soit aussi un mâle, animal. Personnellement, c'est ce qui me fascine le plus. Quand je réalise une sculpture, je suis nécessairement confronté au rapport de l'homme à son propre pénis, avec son membre en mouvement. C'est en quelque sorte la matière ou le jouet de l'homme. Quand il est flasque, il a un peu la consistance de la gelée, mais il change d'état, il entre en semi érection, puis en érection. Il fait partie du corps de l'homme, c'est un peu sa sculpture à lui. Oui, je considère le pénis comme une sculpture personnelle fixée au corps. Pour moi, c'est comme de la glaise, un matériau très mou que l'on peut façonner et qui durcit lentement, puis on le cuit et on immortalise son état solide. A mon sens le pénis est un peu la glaise malléable de l'homme, il peut lui faire prendre différente position et l'utiliser. Moi, je me sers de ma glaise pour faire des expositions, l'homme se sert de la sienne pour donner la vie, c'est son jouet créatif intégré.

Jane McAdam Freud, plasticienne, « Le nu absolu » documentaire de Herbert Eisenschenk 2010 Arte, entre19’40’’ et 20’13’’